LES NATURALISTES PARISIENS

45 Rue de Buffon
75005 PARIS

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Assemblée générale du Centenaire - 7 MARS 2004
Rapport du Secrétaire général Pierre FESOLOWICZ

Chers amis et collègues,

Durant l'année écoulée, nous avons effectué quarante et une excursions et une visite, tenu trois conférences, trois séances de communication et une séance de démonstration. Pour la présente Assemblée générale, il m'a semblé intéressant de vous en présenter les faits les plus marquants, classés par secteurs géographiques.

Commençons par le Sud du Bassin de Paris qui a donné lieu à près de la moitié de nos excursions en Ile-de-France. Deux raisons nous y conduisent : d'une part, la richesse de la flore thermophile et de celle dite montagnarde, et d'autre part, nos bonnes relations avec l'Association des Naturalistes de la Vallée du Loing.

C'est ainsi que nos excursions en forêt de Fontainebleau ont un caractère varié. Nous nous y rendons souvent pour nous y livrer à la botanique comme par exemple le 25 octobre avec Mlle CFESNOY et Mr BONIN, aussi bien qu'à la mycologie avec Mr MERAL.
Soulignons combien celui-ci a eu de mérites à nous montrer de nombreuses espèces malgré la sécheresse de l'année. Le massif de Fontainebleau est encore une localité remarquable pour la bryologie. Le 30 novembre avec Mr ARLUISON, nous avons observé à la mare aux Fées Aulacomnium palustre et la rare ombellifère Apium inundatum. Toute la lichénologie enfin se trouve résumée dans cette forêt. Le 16 mars, dans les gorges de Franchard, Mr KONRAT, Mme GUILLOUX et Mlle FORTIER nous ont montré Ramalina baltica et Umbilicaria polyrrhiza.

La vallée du Loing proprement dite a été le lieu de plusieurs excursions bien dignes de retenir notre attention. L'étude de la botanique du Marais d'Episy, au mois d'octobre sous la direction de Messieurs BONNEL et LE RUYET, a révélé Thalictrum flavum, Senecio ericaefolius, Zannichellia palustris et Tunica prolifera. Belle démonstrations de ce que l'on peut encore rencontrer en fin de saison. A Nemours, au mois de mars, nous avons pu noter Corydallis solida et Artemisia campestris.

La géologie du Stampien est particulièrement significative dans cette vallée, comme nous l'ont démontré Mr CARLIER et Mme BUIGUE à Villers-sous-Grez. Mr THIRY, spécialiste des silicifications, nous a fait observer, à l'appui de théories séduisantes et cohérentes, d'impressionnantes figures de pseudo-karstification dans les dalles de grès verticalisées à Darvault. Nous devons retenir l'existence, au même lieu, de Pirola umbellata.

Dans la vallée de l'Essonne, tôt dans la saison, Mr et Mme PEDOTTI nous ont conduit dans la station d'Asarum europaeum et Hesperis matronalis. Aux sources de la Velvette, l'intérêt s'orienta sur l'étude des belles cressonnières où l'on a remarqué la Fougère aquatique Azolla filiculoides.

La vallée de la Juine est une mine pour l'archéologie préhistorique ; c'est ce qu'a bien compris Mr FAUVARQUE en nous conduisant le 31 août à Janville, sur des sites jusque là méconnus des Naturalistes. Il n'est pas étonnant que le grès, si abondant au Sud de Paris, se soit prêté aux industries humaines.

L'étude de la vallée de l'Orge, le 4 mai à Sermaise, sous la direction de Mr DUPUIS et Mr et Mme PEDOTTI fut une intéressante démonstration de cinq ou six faciès géologiques, de la craie aux sables de Lozère. De plus nous avons noté Sorbus domestica, Lathyrus linifolius sous-espèce montanus et Draba murales. Cette excursion fut complétée au mois de novembre, au départ de Saint Chéron, par une démonstration au cours de laquelle Mr PLUCHON mit l'accent sur les structures microscopiques des roches rencontrées.

La Seine, avec sa large vallée, est célèbre pour la réserve de la Bassée. Sous la direction de Mr TASSET, le 22 juin, les collègues y ont examiné tout à loisir Ophioglossum vulgatum, Viola elatior, Sisymbrella aspera, Lathyrus palustres, et surtout la Vigne sauvage. On doit à Mr ARNAL l'initiative de cette belle excursion, comme on lui doit les indications des sites de plantes protégées à Bois d'Arcy, le 18 mai, avec entre autres Hydrocharis morsus ranae, Veronica montana et Arctium nemorosum.

La Loire, que L'histoire géologique et la tectonique ont détourné de son cours seotentrional est, à elle seule, une limite à nos habitudes floristiques et climatologiques. Nous n'en sommes que plus reconnaissants à Mr SORNICLE de nous y conduire régulièrement, et de nous faire profiter des richesses bctaniques de ce grand fleuve. Le 17 août, il nous a présenté Chenopodium botrys, Corrigiola litoralis et Pulicaria vulgaris. La beauté de ces rives sablonneuses ne fit qu'ajouter au caractère estival fort apprécié des participants.

A l'Ouest de Paris, la craie prend le relais de l'Oligocène peu démantelé. La fréquentation de ce secteur témoigne d'initiatives variées.

Mr JOLY, grand connaisseur de la vallée de l'Eure, n'hésita pas le 25 mai à nous hisser sur les coteaux thermophiles les plus escarpés dominant l'Iton, afin de nous présenter Gymnocarpium robertianum, délicate Fougère à l'abri des formations crayeuses. Dans la même journée, nous avons également observé Dactylorhiza fuchsii et Ophrys fuciflora.

La côte des Deux Amants, que Mr BOCK nous fit gravir le 15 juin, recèle maintes espèces calcicoles qui complétèrent ce cortège floristique. Le retour par les étangs du Val de Rueil nous rappelle toujours que ce site, sur lequel sait si bien nous conduire Mr LASOTA, est également intéressant pour l'ornithologie.

La visite de Port-Royal-des-Champs, le 19 octobre, dirigée par Mr DUPUIS, Mr et Mme PEDOTTI, nous permit d'apprécier un haut lieu de la pensée savante du XVIIe siècle. Un grand moment de l'histoire de l'horticulture y fut aussi évoqué dans le verger des Granges, où nous pûmes comprendre l'importance des travaux de recherche de l'époque. Retenons aussi, de ce jour faste, notre rencontre pleine d'enseignements de la Rouille grillagée du Poirier.

En remontant vers le Nord, l'isolement et l'alignement des buttes stampiennes donnent un caractère original à la répartition des forêts, offrant un éventail de possibilités d'étude, tant pour la botanique que pour la mycologie. Messieurs CHABRIER, BONIN, FALLIES, GASTOVE et Mlle CHESNOY ont bien saisi cet aspect géomorphologique à travers les diverses excursions qu'ils nous ont proposées. Dans la forêt de Retz, Hypericum androseanum et un peuplement à Carex strigosa et Chrysosplenium oppositifolium évoquaient les travaux de Mr JOVET sur le Valois. Teucrium montanum protégé en Picardie nous a valu de faire connaissance avec les Galles d'un Hémiptère Tingide du genre Copium. Dans le bois des Bonnets, le 7 septembre, Messieurs TASSET et BONNEL nous ont fait observer Samolus valerandi et Ambrosia artemisiifolia.

Une prospection plus systématique des buttes lutétiennes les plus septentrionales, entaillées par de multiples petites cavées, conduirait probablement à la découverte d'une flore intéressante.

La structure monoclinale des formations Est du Bassin de Paris, révèle le caractère hydrique du plateau meuliérisé de la Brie. Longtemps tenues à l'écart, faute de drainage, ses forêts n'en sont cependant pas moins dignes d'une grande attention. Au mois de mars, en forêt d'Armainvilliers, avec Mlle AICARDI, je vous ai fait observer la colonisation des ornières argileuses par Pseudephemerum nitidum et Ditrichum pallidum mêlés aux Hépatiques et aux prothalles de fougères. La présence de l'élégant Triton alpestre, témoin du réveil de la faune, vint encore ajouter à ce moment merveilleusement printanier.

La vallée de l'Yerres qui découpe ce plateau a favorisé l'installation de nombreux moulin agrémentant nos excursions comme celle du 20 juillet conduite par Mr FAUCHER, au cours de laquelle nous avons noté Falcaria rivini.

Dans la forêt de Montceau, le 3 août, M. DEMEULANDRE nous fit observer Epipactis purpurata, Lathyrus montanus sous-espèce linifolius et Senécio aquaticus.

Deux grandes excursions étaient au programme de l'année 2003, l'une dans le Bassin parisien et l'autre dans les Alpes.

Les journées d'étude dans le Sancerrois nous ont valu de parcourir des lieux d'une grande richesse tant botanique que géologique. Région bien présentée par Messieurs ARLUISON, PERREAU et TAXI, à caractère jurassique supportant dans bien des cas un tertiaire siliceux dépendant de la tectonique cassante locale. Nous y avons observé entre autres Carex pulicaris, Phyteuma tenerum et Coeloglossum viride. Nous ne pouvions quitter les lieux d'une aussi grande renommée sans goûter ses produits, aussi nos organisateurs ont-ils su prévoir, en complément de journées laborieuses, les visites de caves qui s'imposent à tout connaisseur sérieux.

Le séjour d'une semaine à Pralognan-la-Vanoise, sous la direction de Mr FICHET, a rassemblé près d'une vingtaine de participants; nous y avons vu de nombreuses plantes pour nous peu familières, notamment Eryngium alpinum, Dracocephalum ruyschiana, Antennaria dioica, Paradisium liliastrum et Ranunculus glacialis. Nos recherches persévérantes furent récompensées par la découverte de Linnea borealis. Retrouvée le dernier jour de la session par Mme LEULIETTE et mon épouse, cette délicate Caprifoliacée, fut saluée à la mesure de sa rareté et en mémoire du Prince de la botanique à qui elle a été dédiée.

Les excursions urbaines, malgré leur caractère peu agreste, n'en sont pas moins enrichissantes, pour qui veut comprendre les vestiges et les faits du passé. Ce sont des instants privilégiés où l'Histoire tient sa place légitime, comme partie d'un fond culturel que tout naturaliste se doit de posséder.

Deux excursions de cette sorte ont été proposées en fin d'année. La première en novembre, sous la direction de Messieurs DUPUIS, BOIVIN et moi-même, au cours de laquelle nous avons suivi le cours de la Bièvre, des anciennes carrières de Lutétien dans le parc Kellerman, jusqu'au Jardin des Plantes. Cette belle excursion fut agrémentée d'un déjeuner dans un cadre historique, autrefois fréquenté par de grands écrivains.

La deuxième, au mois de décembre, s'est déroulée sous la direction de Mr BONIN et du Président. Enghien, ville de thermalisme, doit son essor à ses eaux sulfurées, ces dernières, à l'origine sulfatées, ont souvent intrigué les géologues. Bel exemple d'urbanisation découlant directement d'un phénomène naturel resté longtemps mal expliqué.

De telles visites participent de la pratique aussi bien d'une excursion que d'une conférence. Elles permettent de développer un thème dans un cadre évocateur qui sert de support aux commentaires. Dans le cimetière Montparnasse, les sépultures de nombreux hommes illustres ont donné l'opportunité à Mr DUPUIS de souligner l'importance du passé des savoirs pour en comprendre l'avenir. Cette captivante matinée s'est poursuivie avec la visite, sous la direction de Mlle CHESNOY, de la Maison du Fontainier qui permit d'évoquer les progrès de la fourniture de l'eau aux parisiens.

Les conférences et séances de démonstration valent à chacun de recevoir des informations scientifiques dans des conditions optimales sur un sujet donné. Elles permettent d'exposer pleinement, documents à l'appui, ce que chacun devrait aller chercher afin de parfaire son savoir. Cela concerne aussi bien les plantes, comme nous l'a montré Mr PEDOTTI dans sa conférence du 19 janvier, ou encore l'archéologie aérienne de Mr JOY, les scorpions de Mr GOIFFON, les poils chez les plantes de Mr BOCK, ainsi que la chimie des roches du Bassin parisien par Mr KONRAT

En 2003, dans nos séances de communications libres, nous avons séparé les présentations de photographies, des démonstrations d'objets ; le succés de ces dernières nous a incité à renouveler l'expérience,

Les réalisations dont nous venons de passer la revue sont conçues et mises en oeuvre par des collègues que vous connaissez bien, du Président aux directeurs d'excursions, parmi lesquels j'ai l'honneur de me compter aux côtés entre autres, de Mr FAUCHER, Mlle CHESNOY, Mlle LAURENT ou de Mr BOIVIN. Quel est le ressort de leur constant dévouement ? Je pense qu'il s'agit du désir réfléchi d'illustrer, tout ce que le savoir peut apporter aux individus comme aux sociétés, et non pas d'un simple besoin spontané de s'affirmer, sans grand effort intellectuel, dans une action , ou dans une autre.

En notre époque d'échecs scolaires et professionnels, de petits boulots, de conditionnement économique et médiatique, le sens que nous donnons à nos enseignements rencontre parfois de sympathiques incompréhensions. Ceci n'est pas pour nous étonner. Nous n'en demeurons pas moins persuadés que la reconnaissance de la primauté du savoir demeure la voie où doivent persister ceux qui se réclament du nom de naturaliste.

Par ce lien, vous pouvez accéder au compte-rendu de l'assemblée générale du 2 mars 2003
Compte-rendu du Secrétaire Général P. Fesolowicz.


Copyright : Les photographies sont extraites de l'album de Bill Atkinson ©

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